Les oiseaux du lac Volvi.
Nous en étions à nous interroger sur les oiseaux et les poissons du lac Volvi , qui possède, paraît-il, avec les deux lacs Prespa et le défunt lac Koronia une ichtyofaune particulière dont quelques spécimens se retrouvaient dans nos assiettes. Le matin nous avions rencontré deux pèlerins russes qui se rendaient à pied à l'Agios Oros en portant une châsse recouverte du drapeau national. Il faisait 33° Celsius, mais sur le bitume la température dépassait les 40. Nous avions décidé de ne pas reprendre l'autoroute, mais de longer le lac pour profiter des nids de cigognes des villages et des échassiers qui stradaient les roseaux. C'est là que nous les avons aperçus et j'ai d'abord pensé à d'autres pèlerins : ils étaient une trentaine, quelques hommes et surtout des femmes et des enfants dont certains tout petits, portés sur le dos ou sur les épaules. A la façon proprette dont ils étaient vêtus, j'ai tout de suite pensé à la bataille d'Alep, la fraction de la middle-class qui a pu s'échapper cherche à rejoindre les routes du Nord. 40°. Ils se dirigeaient tout droit vers les nasses de la frontière macédonienne. Depuis je pense à eux toutes les nuits et j'essaie des images pour apprivoiser cette impitoyable réalité : ils ont fui les oiseaux du lac Stymphale, car Гераклея Понтийская bombarde à l'aveugle (Héraclès du Pont , Héraclès le Russe en quelque sorte) ; d'autres fois je pense à un bouquin poignant que mon fils a co-écrit à propos d'une autre guerre et des nasses de la frontière espagnole, il s'appelle « Polvorientos caminos ». Aujourd'hui il y a moins de poussière, il y a le bitume qui concentre la chaleur. On devrait toujours avoir un pack d'eau fraîche dans sa voiture, on se sentirait moins démuni. Dans le fond, sur la photo, Samothrace et derrière ce rocher de 1600m, les premières îles turques.