Ne rien apprendre
Qu'il disait ! Ne plus rien apprendre, plutôt. J'ai égaré mon Goytisolo. S'il ne remonte pas à la surface, j'essaierai de m'en racheter un : je dois rendre les livres qu'on m'a prêtés ! Et puis j'en ai besoin. Juan Goytisolo n'est même pas mort, moi je meurs de plus en plus souvent ; à preuve, j'entendais tout à l'heure au milieu du marché de Noël, la plainte continue et modulée des vivants. Certains se sont déjà transformés en dogues, d'autres sont repliés dans le froid et se plaignent des 327€+12 qu'on leur devait, qu'ils n'ont pas reçu, leurs téléphones prennent à témoin les jeunes adultes qui trimbalent dans le tram des sacs Yves Rocher et l'Occitane, je croyais que ces marques aussi étaient mortes. D'ailleurs c'est peut-être le cas : comme tous les morts, je suis transparent, mais je vois et j'entends. Au milieu des bandits qui devant leur défaite à Alep où ils ont entraînés des milliers de morts, appellent les derniers débris de la gauche à vilipender un Poutine dont le cynisme a un sourire de Mazarin. C'est pourtant Mme Hidalgo qui a inauguré le « Parvis Jean-Paul II » en compagnie d'un émissaire de Poutine, comme de Charette à Ploërmel (tu sais très bien, Hervé, que les héritiers des zouaves du pape sont aux côtés de Bachar). La longue plainte d'un peuple transi traverse les feuilles mortes et les rhizomes des pavés, mais Baudelaire n'a jamais su entendre la plainte des vivants, ceux qui, à la rue, doivent encore de l'argent au RSI, ceux qui derrière les vitres du PMU jouent leurs derniers deux euros. Καλο χειμώνα, me disait mon ami, qui, lui, était babouviste grec. D'où le bric-à-brac... et mon vélo.