Les sans-culottes et les Champs-Elysées.
Paris a renié son passé. Mais parfois il revient : il n’était pas tout à fait mort. Volver. Peut-être est-il significatif que la manifestation contre les violences faites aux femmes ait eu lieu le même jour que celle des gilets jaunes. Dans les deux cas la question de l’État était posée. Certaines initiatrices de la manifestation violette des femmes, n’ont pas plus de mandat qu’un gilet jaune de base, mais demandent comme eux beaucoup à l’Etat. Je ne vois pas bien pourquoi l’État protégerait les femmes, l’activité de la sous-ministre ad hoc (qui s’est trompée de jour) et de celle qui l’a précédée (qui était dans la manif), le prouvent assez. La question a été posée à l’occasion du Congrès de Genève de l’AIT (1866), c’était une femme qui devait avoir le mandat des ovalistes (ouvrières de la soie) de Lyon, ce fut Bakounine qui s’en empara. Ah les anars, parfois, quand ils s’occupent des mandats ! Les femmes sont fondées à revendiquer, elles ont imposé, avec la classe ouvrière, des conventions collectives , des lois qu’elles on fait ensuite traduire en services publics, en institutions ouvrières ou en règles de protection, le cas échéant. Avec, sans ou contre les chefs et cheffes d’entreprise. Malgré l’État. L’État est une bande d’hommes armés et depuis qu’il y a des ministres ad hoc le travail de nuit des femmes a été rétabli,la CSG matraque les veuves retraitées, les suppressions de 1/2 part pour enfant ont frappé et voici que les pensions de reversion sont menacées. Et les gilets jaunes comportent beaucoup de femmes. Les gilets jaunes des Champs Elysées étaient-ils manipulés ? Les femmes et les enfants du « dimanche rouge » conduits par le pope Gapone, agent de l’Ohkrana l’étaient, et pourtant elles et ils ont donné un signal. Les photos des manifs de samedi étaient magnifiques, celle sur les Champs et celle avec les violettes, et les barricades allaient bien avec les décorations rouges de Noël.
Alors, la nature sociale des gilets jaunes ? La grimace de l’Histoire c’est que le rapport symbolique Paris-Province paraît inversé. Je vais souvent à Paris, le peuple des bus n’y est pas le même qu’à Angers ou Trélazé : ni les odeurs, ni les couleurs, ni les voix : j’ai un peu la même formation que les parisiens intra-muros, mais j’ai l’impression, que je ne suis pas du même monde.
Pourquoi les sans-culottes ? Parce que c’est l’élément vestimentaire qui restera. Comme pour les canuts de la chanson. Pour se débarrasser des plus remuants des sans-culottes, la guerre, même la guerre civile, était fort utile en 1793. Notre sous-Badinguet va proposer la « guerre pour la planète », pas sûr que ça marche. Les artisans du faubourg Saint-Antoine, les journaliers, les aubergistes ont des successeurs avertis : jusques ici ils ont bloqué la distribution, pour bloquer la production ils faudrait d’autres alliances. En invoquant peuple et populisme, Macron était provocateur, mais pas stupide : tant qu’on reste sur le terrain du « peuple » on peut s’en sortir : l’Italie et la Hongrie le prouvent. Mais, même en Grèce où les dirigeants n’ont que le « peuple grec » à la bouche, les organisations syndicales résistent et structurent une classe qui combat pour sa survie. On va donc nous dire que la planète mérite bien que le peuple s’unisse, toutes classes et genres confondus, et qu’il faut que toutes les organisations du peuple, y compris les confédérations syndicales, s’unissent avec les photographes animaliers, les industriels citoyens, les défenseurs des ours blancs , les dévots du parc Kruger, des pandas et des baleines,les Yann-Arthus Bertrand, les Canfin et les Bové, les Hulot et les Orphelin, les Rugy et les cheffes d’entreprise, les savants Cosinus et les Géo Trouvetou, les Bill Gates et les Jacob Delafon, les Cohn-Bendit et les Ruth Elkrief, les Aphatie et les Bruno Jeudy, les Saint-Cricq et les Ernotte, les Bolloré (si !) et Carlos Goshn délivré par le GIGN (là c’est moins sûr!), les Berger et leurs brebis, les Barbarin (j’ai quand même un doute, quand à sa survie, mais pas énorme), les Orphelins d’Auteuil et les Scouts de France, les zadistes repentis, la Société des Amis de Benalla, le journal Le Monde et les décodeurs de Libé, Jean Jouzel, Francis Chouat et le successeur de Georges Marchais, les vieux maos de France Culture, le Lion’s Club de Deauville et Jean-Luc Petithuguenin, les Nicolin fils et les Mourad Boudjelal... plus j’avance et plus je me dis qu’il n’y arrivera pas. Alors le concert de métal sur les Champs annonçait peut-être quelque chose.