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Publié par Michel GODICHEAU

Notre camarade Marie-Thérèse Châlons est décédée le 20 mai dernier. Et elle me manque. Un septuagénaire sait qu’il est pénible de faire le compte des trous dans l’eau : certains se referment et d’autres pas. Mimi préparait l’Ecole normale au cours complémentaire et j’ai feuilleté l’Atlas Hachette de 1929 qu’elle étudiait pour obtenir le Brevet et devenir institutrice. L’image ci-dessous en est tirée. Au programme du Brevet depuis 1925 « Le partage de l’Afrique » (arrêté du 9 février 1925). On y remarque le Cameroun (hachuré) où la France avait élargi son Empire sous le prétexte d’un mandat de la SDN sur cette ancienne colonie allemande. La civilisation et l’humanisme des Lumières y pénétraient ! Dans Informations Ouvrières (un journal qui m’est indispensable) en ce début août on cite l’ouvrage de Théodore Areba Yenbe (Cameroun, Mémoire d’un colonisé) L’Harmattan  qui rapporte ainsi l’arrivée des soldats de « la France libre » en 1940  sous la direction d’un futur Premier Ministre de la Ve République:

« C’est ainsi que la maison de mon père, Hermann Yenbe, accueillit l’officier Pierre Messmer, et deux de ses camarades. Mon père et sa famille nombreuse s’installèrent dans une hutte en natte montée à la hâte. Dans les quartiers urbains et suburbains, les rafles et les fouilles faisaient rage. Tôt dans la matinée, les cases des indigènes étaient fouillées de fond en comble par les militaires qui arrachaient les couvertures en laine pour les remettre aux soldats ; les poules, les chèvres, les moutons et les porcs ne furent pas épargnés par cette rafle et passèrent régulièrement dans les casseroles pour nourrir la légion.

Une fois les problèmes de l’intendance réglés, il fallait faire face à celui non moins crucial des ébats sexuels des officiers et soldats de la légion. Une rafle spéciale fut ordonnée ; elle avait pour objectif le rassemblement forcé de toutes les jeunes filles pucelles aux poitrines agressives pour les jeter dans le camp Génin où étaient logés les légionnaires. Le spectacle se passe de commentaire. » (p.38)

Il est aujourd’hui une polémique qui atteint les facultés de lettres "intersectionnelles" sur le qualificatif de « racialisés », qui m’apparaît assez juste, et sur la capacité des blancs à être antiracistes (ça me fatigue un peu, moi  j'avais les Althusseriens, après ce furent les Bourdieusiens, les Deleuziens...). Je ne sais pas si je suis antiraciste, mais qui pourrait nier le racisme d’État qui entourait Pierre Messmer ? Pour ma part et pour ces raisons et quelques autres, je soutiens le Parti Socialiste (noir) d’Azanie (Azapo- Afrique du Sud), je soutiens l’Union Générale des Travailleurs de Guadeloupe, le droit des noirs américains à se doter de leur propre représentation politique. En France ? La politique répressive sélective à l’égard des gens de couleur et des musulmans d’apparence est un fait, mais depuis 39 semaines c’est sur les Gilets Jaunes , une majorité de « mâles et de femelles cisblancs », que l’on tape. Bien sûr l’affaire est extensible comme en témoigne la mort de Steve. Cela s’étend à la jeunesse car il s’agit, avec des milices et des responsables de plus en plus difficilement contrôlés, de provoquer la peur et donc de s’en prendre à la jeunesse (pour la couper en groupes plus faciles à maintenir) . Car l’avenir sciemment préparé c’est le système Deliveroo à 50 heures/sem pour 600€, la fin des systèmes de pensions et retraites, la fin de l’assurance chômage. Donc résister, antiracistes ou pas, c’est tenter d’unir exploités et opprimés.

Mimi a dessiné il y a presque cent ans sur son programme officiel du brevet un Anamite et son chapeau, un pot de chambre (avec l’inscription Bel Air!) une faucille et un marteau, un canard, une svastika inversée, un colonisé avec un chèche, un brin de gui, un cochon, une pomme, une poire. Elle a ensuite partagé les enthousiasmes de la Yougoslavie de 1950, des kibboutzin de l’après-guerre . Mais en 1947 c’était une jeune adulte, elle participait à « L’Effort Social  L’Hebdo de la fédération socialiste S.F.I.O. de Maine-et-Loire » , un journal très intéressant où les jeunes s’interrogeaient sur la nouvelle aventure coloniale au Tonkin. Mimi avait gardé ce numéro du dimanche 9 mars 1947. pas à cause du Tonkin : parce que la fédération anarchiste y annonçait deux conférences de Paul Lapeyre ( le beau-frère de mon camarade Roger Pantais) qui allaient la marquer. L’une était à Angers, dans la salle de la Mutualité aujourd’hui disparue, l’autre à Trélazé , le mardi 11 mars 1947, salle de la Maraîchère.. Le thème ? « L’Église contre les travailleurs » (à suivre)

 

Marie-Thérèse Châlons, libre penseuse, le Tonkin, le Cameroun  et les Gilets jaunes.
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