Les lapis lazuli, les farangis et les angrisis.
D’un vieux et bon livre d’archéologie, j’ai appris que vers 2500 avant notre ère, on trouvait à Sumer des Lapis Lazuli identifiés comme provenant de vallées situées dans ce qui est aujourd’hui l’Afghanistan. On s’étonne parfois de la diversité des réactions des Tadjiks, des Ouzbeks et des Turkmènes devant l’aventure militaire de Poutine en Ukraine. Non pas que les « élites » soient indifférentes, mais ces peuples en ont vu d’autres. À Tâshqurghân, on est aux frontières de ces mondes et de la Perse : il y a 4500 ans des circuits commerciaux permettaient d’acheminer les jolies pierres bleues sur près de 2000 kilomètres pour les utiliser dans la sculpture. Cela repose les yeux paraît-il… On en a bien besoin.
C’est bien après que Al Iskander le Macédonien, vint donner son nom à une ville d’Ouzbékistan et encore plus tard vinrent les croisades, premières invasions des farangis (qui ne sont pas venus jusque là, mais manifestent le danger que représente l’Occident).
Lors de ses premières visites à Tâshqurghân, dans les années soixante du siècle dernier, l’ethnologue suisse Pierre Centlivres (nom réservé aux ethnologues neuchâtelois avec une belle maison et un beau jardin !) décrivait ses premières surprises de jeune chercheur :
« A leurs yeux, les deux guerres mondiales ne comptaient guère, mais davantage la fuite de l’émir de Boukhara à Kaboul en 1330 (1921 de notre ère) et la naissance du Pakistan. Les Anglais demeuraient l’ennemi par excellence. A Tâshqurghân, il y avait trois façons de nommer les étrangers : khârefi, celui qui vient de l’extérieur, farangi, l’Occidental, et angrizi, l’Anglais. On pouvait rencontrer des gens disant avoir jadis connu un derviche, dont on avait su après sa mort qu’il était un agent britannique déguisé, et cette légende tendance n’était pas étrangère à la méfiance avec laquelle on tenait, jusque dans les années soixante, le voyageur étranger. De la Seconde Guerre mondiale, on savait que les Allemands et Hitler avaient combattu les Anglais, et c’était un bon point en faveur des premiers . » (Pierre Centlivres « Chroniques afghanes 1965-1993 » Éditions des Archives Contemporaines – Amsterdam) -p.48.)
Je ne sais si cela perdure, mais il est possible que dans le conflit entre les farangis russes et ukrainiens (tous des Roums de Byzance ou de Moscou) , les lettrés regardent d’abord ceux que soutiennent les angrisis et leurs successeurs américains. Le Tadjikistan s’est abstenu sur la résolution de l’ONU demandant à la Russie de mettre fin à la guerre en Ukraine et l’Ouzbékistan n’a pas pris part au vote.
Cette chanteuse Tadjik, née dans l’ancienne Leninabad a fait là-dessus plus de 3 millions de vues, ses parents avaient émigré à Petrograd, mais plus tard elle est revenue faire carrière ici.